Le sommeil a toujours été un réel mystère – et continuera sûrement de l’être. Selon les étapes de notre évolution, le sommeil semble être un aspect que nous aurions pu laisser de côté depuis quelques décennies. Le fait que nous sommes dans un état semi-inconscient pendant un tiers de notre journée, chaque jour, nous laissant vulnérables à n’importe quel danger, et ce, depuis le tout début de l’espèce humaine, m’incite à me demander comment nous avons pu survivre si longtemps.
Par contre, cela démontre que le sommeil est évidemment essentiel à notre santé et notre bien-être. Si ce n’était pas le cas, les premiers humains qui n’avaient pas besoin d’autant de sommeil auraient pris le dessus du patrimoine génétique et ceux qui avaient besoin de beaucoup de sommeil auraient sûrement été mangés par un prédateur. Comme je suis contente que cette époque soit révolue ! Être mangé tout rond ne doit pas être agréable…
Jusqu’à maintenant, la communauté scientifique n’a pas été en mesure de nous expliquer pourquoi nous dormons, mais les chercheurs (et les nouvelles mamans) s’entendent pour dire qu’à tous les niveaux, une bonne nuit de sommeil est excellente pour le corps.
Apprentissage
Nous savons tous qu’il est plus difficile d’apprendre de nouvelles choses lorsque nous n’avons pas assez dormi. Par contre, l’absorption d’une nouvelle information ne représente que la moitié de l’équation. En fait, d’un point de vue technique, ce n’est que le tiers. L’apprentissage et la mémoire se divisent en trois fonctions : l’acquisition, la consolidation et la mémorisation. En bref, vous devez recevoir la nouvelle information pour ensuite la stabiliser dans votre mémoire et, finalement, vous devez être en mesure d’y accéder (par exemple, lorsque vous regardez un jeu-questionnaire à la télévision).
L’acquisition et la mémorisation sont deux étapes qui se font lorsque nous sommes éveillés. Par contre, la consolidation « se fait durant le sommeil par le renforcement des connexions neurales qui forment nos souvenirs. L’ensemble des données démontre que bien dormir chaque jour est très important pour l’apprentissage et la mémoire » . Donc même si vous pouvez vous concentrer sur ce que vous apprenez et que vous retenez de l’information, sans sommeil, cette information ne sera pas bien emmagasinée dans votre cerveau et lorsque vous en aurez besoin, vous aurez un trou de mémoire.
Je crois fermement que l’apprentissage et l’éducation font partie d’un processus continu. Par contre, lorsque nous ne sommes plus à l’école, l’apprentissage devient optionnel. Pour vos enfants, leur responsabilité principale pour les premières 18 à 20 années de leur vie est d’apprendre. Imaginez à quel point il est important pour eux de retenir ce qu’ils ont appris – c’est pourquoi il est difficile d’exagérer l’importance d’établir une bonne routine de sommeil.
Humeur
Tout le monde sait que lorsqu’une personne manque de sommeil, elle peut avoir la mèche courte et devenir facilement irritable. Une étude menée par l’Université de Pennsylvanie a démontré que les gens qui manquaient de sommeil, ne serait-ce que partiellement, ressentaient du stress, de la colère, de la tristesse et de la fatigue mentale.
Ce n’est pas tout à fait nouveau comme information. Nous sommes tous conscients que nous devenons émotifs lorsque nous n’avons pas assez de sommeil, mais pourquoi ? Pourquoi les effets ne sont-ils pas similaires à quelques verres de vin ? Pourquoi le manque de sommeil ne nous incite-t-il pas à dire aux gens que nous les aimons ou à devenir pleinement confiants en nos aptitudes de karaoké ?
Encore une fois, c’est un réel mystère, mais les chercheurs supposent que le manque de sommeil agit sur l’amygdale, la petite partie du cerveau en forme d’amande qui déclenche, entre autres, les sentiments de colère et de peur. Ces sentiments intenses peuvent provoquer un sentiment général de stress et d’animosité envers les autres.
Santé
Nous savons que bien dormir est essentiel pour l’apprentissage et le bien-être émotif, mais qu’en est-il des avantages plus tangibles ? Mise à part manger et respirer, il n’y a rien de plus bénéfique qu’une bonne nuit de sommeil pour notre santé.
« D’une façon ou d’une autre, le sommeil est réparateur pour tout notre corps, que ce soit d’un point de vue moléculaire, du côté de notre bilan énergétique, ou encore pour nos fonctions intellectuelles, notre vigilance et notre humeur », a expliqué Dr Merrill Mitler, expert du sommeil et neuroscientifique des National Institutes of Health aux États-Unis.
Les gens qui dorment régulièrement entre 7 et 9 heures démontrent des taux considérablement plus bas d’obésité, d’hypertension artérielle, d’AVC, d’infections, de dépression, de diabète, d’inflammation, d’hypertension, de maladies cardiaques, de crise cardiaque et de défaillance cardiaque. Ils ont aussi démontré qu’ils étaient plus satisfaits sexuellement, qu’ils affichaient un meilleur rendement au travail et qu’ils prenaient moins de congés que les personnes qui dorment habituellement moins de 7 heures par nuit.
Il est évident que le sommeil, bien que mystérieux, fait partie intégrante d’un mode de vie sain.
Par contre, tout va changer après la naissance d’un bébé, n’est-ce pas ? Vous venez de mettre au monde un petit être et tout le monde autour de vous s’attend à ce que vous sacrifiiez votre sommeil pour quelques années (6 à 7 ans tout au plus) afin de répondre aux besoins de votre enfant qui, pour une raison ou une autre, semble avoir le plus besoin de vous au milieu de la nuit.
Selon moi, ce mythe est le plus problématique pour les nouveaux parents et nous devrions le mettre au rancart.
Seulement voilà, votre bébé a besoin d’encore plus de sommeil que vous. Il peut sembler au repos lorsqu’il dort, mais en réalité, son petit corps travaille très fort ; il sécrète des hormones de croissance pour l’aider à prendre du poids et s’épanouir, ainsi que des cytokines pour combattre les infections et produire des anticorps, sans oublier tous les systèmes complexes et incroyables qui travaillent ensemble pour faciliter sa croissance et son développement, et ce, jusqu’à son adolescence (en temps normal).
La nature s’occupe de faire le gros du travail. Tout ce que votre enfant doit faire, c’est fermer les yeux et dormir.
Puisqu’il s’agit de mon domaine d’expertise, je vois TROP de gens qui disent aux nouveaux parents que les bébés ne dorment pas bien et qu’ils devraient s’attendre à se faire réveiller entre 7 à 8 fois par nuit.
À tous ceux qui disent ce genre de chose, j’aimerais leur dire qu’ils sont LOIN d’avoir raison. En plus d’être fausse, cette notion est dangereuse. Dire aux nouveaux parents qu’ils doivent accepter les problèmes de sommeil de leur enfant les empêche d’aborder le problème, ce qui est très inquiétant pour tous les membres de la famille. Ce n’est pas parce que ces nouveaux parents sont égoïstes ou qu’ils aiment faire la grasse matinée – c’est parce qu’ils ont autant besoin de bien dormir que leur enfant pour toutes les raisons énumérées ci-haut.
Si votre bébé se réveille 7 à 8 fois par nuit et qu’il pleure jusqu’à ce que vous alliez dans sa chambre le réconforter, ce n’est pas normal. Il s’agit d’un enfant qui a des problèmes de sommeil et cela interfère avec le développement naturel de son corps. C’est comme une infection d’oreille ou la jaunisse ; il s’agit d’un problème de santé et il existe des remèdes. Donc si quelqu’un vous dit de prendre votre mal en patience pour les 6 prochaines années, ne suivez pas son conseil. Je suis certaine que ce n’est pas malintentionné, mais ce genre de commentaire doit cesser.
Les problèmes de sommeil durant l’enfance mènent aux problèmes de sommeil durant l’adolescence, jusqu’à ce que votre enfant devienne un adulte qui ne priorise pas son sommeil, ce qui peut déclencher plusieurs problèmes de santé graves.
Cela étant dit, pour toutes les nouvelles mamans, je vous implore : n’accepter pas de vous faire dire que le sommeil est un luxe que vous devez sacrifier pour quelques années. Si votre bébé ne dort pas bien, demandez-vous pourquoi. Ce n’est pas égoïste ni illusoire de vouloir trouver la source du problème ; c’est nécessaire et les avantages sont innombrables.
Notes de bas de page
1. Division of Sleep Medicine de l’Harvard Medical School, extrait de healthysleep.med.harvard.edu/healthy/matters/benefits-of-sleep/learning-memory, 18 décembre 2007
2. Sleep. Avril 1997;20(4):267-77. Cumulative sleepiness, mood disturbance, and psychomotor vigilance performance decrements during a week of sleep restricted to 4-5 hours per night. Dinges DF1, Pack F, Williams K, Gillen KA, Powell JW, Ott GE, Aptowicz C, Pack AI.
3. National Sleep Foundation, 2008 Sleep in America Poll, Summary of Findings extrait de sleepfoundation.org/sites/default/files/2008%20POLL%20SOF.PDF[MB1]
Comments